La présence de molécules nocives dans l’air (comme le monoxyde de carbone et les gaz à effet de serre) est indétectable à l’œil nu. Or, il en va de même dans l’eau, où plusieurs contaminants passent inaperçus. Parmi eux, les médicaments causent de plus en plus de soucis aux experts en environnement.
Que peut-on faire pour remédier à cette situation? Voyons d’abord d’où ils proviennent et quel est leur impact sur les écosystèmes.
Comment se fait-il qu’on trouve des médicaments dans l’eau?
Lorsque nous consommons des médicaments (anti-inflammatoires, hormones, antibiotiques, antidépresseurs, etc.), nous les éliminons par notre urine, qui se retrouve ensuite dans les égouts. Bien que les eaux usées subissent des traitements avant d’être acheminées vers les cours d’eau, une certaine proportion de médicaments demeure dans l’eau, notamment en raison de leur grande stabilité, qui leur permet de résister aux procédés de traitement.
Les animaux d’élevage ayant reçu des médicaments contribuent également à cette problématique. En effet, leurs excrétions se retrouvent parfois dans les lisiers et les fumiers que nous utilisons ensuite comme engrais, ainsi que dans les boues d’épuration.
Enfin, les produits médicamenteux peuvent aussi provenir, dans une moindre mesure, des rejets accidentels, hospitaliers et industriels dans le réseau d’aqueduc.
Une menace pour la faune aquatique
Plusieurs études démontrent les effets néfastes des médicaments rejetés dans l’eau sur la faune et la flore aquatiques. Par exemple, la présence d’hormones contribue à la féminisation des poissons mâles, perturbant leur système reproducteur et menaçant leur survie à long terme.
De leur côté, les antidépresseurs influencent les comportements de certains poissons, comme leur réflexe de fuite ou de faire le mort, ce qui accroît leur vulnérabilité aux prédateurs. D’autres molécules toxiques mettent en danger plusieurs espèces par leur impact sur les populations aquatiques.
Des pistes de solutions
La diminution de la contamination des eaux par les composés pharmaceutiques passe inévitablement par l’amélioration de l’efficacité des stations d’épuration. Heureusement, la communauté scientifique travaille à mettre au point des techniques plus poussées qui s’avèrent prometteuses.
L’ozonation, entre autres, permet d’éliminer une bonne partie des médicaments dans l’eau. Ce procédé consiste à injecter des molécules d’ozone (O3) dans l’eau, où il réagit avec les microorganismes et les polluants pour les décomposer et les rendre inoffensifs. Son implantation est en cours dans plusieurs stations d’épuration, notamment à Montréal.
Dans un article de la revue Nature Water, on rapporte que des scientifiques suédois ont élaboré un matériau composé d’un mélange d’ions de zirconium et d’une molécule qu’on trouve dans certaines écorces d’arbre, qui pourrait permettre d’absorber certains polluants pharmaceutiques, à la manière d’une éponge. Une piste intéressante, quoique coûteuse…
Autre bonne nouvelle : selon la veille scientifique réalisée par l’INSPQ sur les produits pharmaceutiques et de soins personnels (PPSP) présents dans l’eau potable, il est peu probable qu’ils engendrent des effets sur la santé humaine aux concentrations observées.
Comment aider?
Malgré tout, la présence des médicaments dans l’eau ne doit pas être prise à la légère, puisqu’ils persistent longtemps dans l’environnement et que l’usage des médicaments augmente au fil des années, en particulier à cause du vieillissement de la population.
Dans cette optique, l’industrie pharmaceutique devrait également faire partie de la solution en élaborant des molécules vertes qui se décomposeraient rapidement dans l’environnement.
En tant que citoyen ou citoyenne, vous pouvez également contribuer à protéger notre eau par des actions simples :
- Éviter de jeter les médicaments et autres produits de soins personnels (crèmes, parfums, écrans solaires, etc.) dans les toilettes et les éviers. Tout médicament périmé ou non utilisé doit être rapporté en pharmacie, où il sera éliminé de façon sécuritaire.
- Consommer les médicaments de manière responsable, c’est-à-dire respecter la posologie prescrite et éviter l’automédication, afin de limiter les rejets de composés pharmaceutiques dans l’eau.
- Sensibiliser son entourage : les changements de comportements passent inévitablement par la transmission de la bonne information.
- Aborder le sujet du traitement des eaux avec son conseiller municipal ou sa conseillère municipale pour l’inciter à agir.
Ensemble, nous avons le pouvoir de changer les choses, alors n’hésitez pas à partager cet article de blogue!
Sources
Bourquin, Chloé. (17 juin 2024). Les poissons des rivières gavés de médicaments, dans lapresse.ca. https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2024-06-17/les-poissons-des-rivieres-gaves-de-medicaments.php
GreenShield. (14 novembre 2024). Rapport sur les tendances des médicaments 2024 de GreenShield : coût du coût des médicaments et de l’utilisation des médicaments liés à l’obésité et à la santé mentale. https://www.greenshield.ca/fr-ca/salle-de-presse/rapport-sur-les-tendances-medicaments-2024-de-greenshield-forte-hausse-du-cout-des-medicaments-et-de-lutilisation-des-medicaments-lies-a-lobesite-et-a-la-sante-mentale
INSPQ. (4 octobre 2019). Les produits pharmaceutiques et de soins personnels dans l’eau potable – Regard sur la veille scientifique. https://www.inspq.qc.ca/bise/les-produits-pharmaceutiques-et-de-soins-personnels-dans-l-eau-potable
Svensson Grape, E., Chacón-García, A.J., Rojas, S. et al. (2023). Removal of pharmaceutical pollutants from effluent by a plant-based metal–organic framework. Nat Water 1, 433–442. https://doi.org/10.1038/s44221-023-00070-z
Ville de Montréal (10 août 2022). Désinfection à l’ozone : travaux à la station d’épuration Jean-R.-Marcotte. https://montreal.ca/articles/desinfection-lozone-travaux-la-station-depuration-jean-r-marcotte-27451#:~:text=%2DMarcotte%20permettront%20de%20d%C3%A9sinfecter%20les,afin%20d’utiliser%20cette%20technologie.